« Je veux redonner de la visibilité aux assistantes maternelles »
L’assmat : Les assistantes maternelles ont exprimé leur colère contre l’article 49 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) lors d’une grève inédite mardi dernier. Avez-vous entendu leur message ?
J’insisterai d’abord sur ce que nous voulons faire : Monenfant.fr est un site d’information qui permettra aux parents de trouver un mode de garde pour leur enfant et ainsi de concilier vie familiale/vie professionnelle de façon sereine. Il permettra aux parents d’avoir une visibilité sur les crèches, halte-garderies et assistantes maternelles proches de chez eux.
Cette visibilité est aussi bienvenue pour les assistantes maternelles qui ont parfois besoin de se faire connaître des parents. Elles n’accueillent pas toujours autant d’enfants qu’elles le souhaiteraient.
J’ai retenu deux éléments de l’inquiétude des assistantes maternelles. D’abord, la question de l’inscription de leurs coordonnées et de leurs disponibilités. J’ai entendu plusieurs assistantes maternelles dire qu’elles seraient contraintes d’inscrire leur planning précis. Il ne s’agit pas de cela.
Nous leur demandons de pouvoir déclarer le nombre de places qu’elles ont dans leur agrément et leurs disponibilités. La fréquence de mise à jour de cette capacité d’accueil sera fixée avec les professionnelles et les représentants des assistants maternels. Il pourra être par exemple de deux à trois fois dans l’année : en début d’année et en juin en prévision de la rentrée des classes de septembre. Ce ne sera pas la même fréquence que pour les crèches.
Sur la question des sanctions, j’entends leurs inquiétudes, et je voudrais les rassurer.
Lorsqu’une assistante maternelle n’aura pas renseigné de façon régulière ses disponibilités, elle va recevoir un premier courrier de la part de la CAF qui va l’informer de la nécessité de renseigner ces capacités d’accueil, pour les raisons que nous venons d’évoquer. Elle sera orientée vers le relais d’assistantes maternelles (RAM) proche de chez elle qui pourra l’accompagner. Si à la suite de ce courrier il n’y a toujours pas de renseignement de sa part, c’est le département qui va lui renvoyer un courrier, lui précisant qu’elle peut être accompagnée par le service de la Protection maternelle et infantile (PMI) dans la compréhension de cette mesure. Et si à la fin, il n’y a toujours pas de renseignement, ce manquement ne pourra pas constituer le seul critère de retrait d’agrément (1). La commission statuera sur l’ensemble de la situation de l’assistante maternelle : il n’y aura pas de sanction à l’aveugle liée à l’absence de renseignement des disponibilités.
L’obligation d’inscription et de renseignements des disponibilités sur monenfant.fr devient toutefois un nouveau critère de l’agrément ?
Le critère de l’agrément, c’est le professionnalisme de l’assistante maternelle et la conformité de son domicile. Une fois qu’elles auront l’agrément, leurs coordonnées seront accessibles sur le site. Nous ne leur demandons pas de s’inscrire avant la délivrance de leur agrément. Et après nous leur demandons de renseigner leurs disponibilités quelques fois dans l’année. Je veux rassurer et que les choses soient claires pour tout le monde : il s’agit de faire se rencontrer des professionnels de la petite enfance dont je connais l’engagement et la qualité d’accueil et des parents qui partout en France ont besoin de faire garder leurs enfants. Monenfant.fr est un site internet public, qui donne une information claire sur les accueils du jeune enfant existant à côté de chez soi. Il existe déjà des sites portés par des collectivités, des départements, qui permettent une certaine visibilité à une échelle locale par exemple. Nous voulons une réponse homogène sur le territoire. C’était l’engagement pris par Édouard Philippe lors de sa déclaration de politique générale, devant l’Assemblée nationale.
Qu’allez-vous faire pour l’harmonisation entre ces sites et monenfant.fr ?
Nous ne pouvons pas intervenir dans l’utilisation des sites qui n’appartiennent pas à L’État, tant que ceux-ci respectent la loi évidemment. En revanche, mon rôle en tant que ministre en charge de la politique familiale et de l’accompagnement à la garde d’enfants, c’est de permettre une homogénéité sur le territoire. Nous devons apporter une réponse pour tous les parents, qu’ils habitent en Gironde, dans les Pays de la Loire, en Outre-mer ou au fin fond de la Creuse.
Selon la CNAF, actuellement vingt départements ne transmettent toujours pas les coordonnées des assistantes maternelles au site monenfant.fr : comment allez vous régler cette question là ?
C’est l’objectif de l’article 49 qui va permettre aux départements, qui délivrent l’agrément, de renseigner les coordonnées. Aujourd’hui, le site monenfant.fr est alimenté à 75 % des coordonnées des assistantes maternelles transmises par les départements.
Donc tous les départements seront amenés obligatoirement à fournir les coordonnées ?
Bien-sûr. Actuellement des départements ne les fournissent pas, car ils nous expliquent disposer de leur propre site. L’article 49 vise à modifier cela et permettre de recueillir toutes les informations nécessaires pour faire se rencontrer parents et professionnels de la petite enfance, partout sur le territoire. C’est une question de justice et d’égalité.
Reconnaissez-vous toutefois une maladresse dans la façon de présenter cette mesure, dont l’aspect « sanction » a profondément heurté la profession ?
Sans doute, mais c’est justement pour cela que je veux rétablir la vérité sur cet article et expliquer précisément pourquoi le Gouvernement le met en place. Nous considérons que les assistantes maternelles, qui constituent le premier mode de garde en France, sont de vraies professionnelles de la petite enfance au même titre que tous les autres professionnels du secteur. C’est pourquoi nous déployons 1000 RAM afin de soutenir les parents et d’accompagner les assistantes maternelles dans la gestion de leur travail au quotidien. Le plan de formation des 600 000 professionnels s’adresse aussi bien aux assistantes maternelles qu’au personnel des crèches. Enfin, les ordonnances de la loi Essoc en cours d’écriture prévoient deux avancées majeures pour les assistantes maternelles : le droit à la médecine du travail et l’indemnisation au titre de l’assurance-chômage en cas de démission pour défaut de vaccination obligatoire de l’enfant (2). J’entends donc leurs inquiétudes, mais je veux les rassurer, car mon combat c’est aussi de leur redonner toute la visibilité, toute la reconnaissance et toute la sécurité qu’elles méritent.
(1) L’Assemblée nationale a adopté le mardi 26 novembre 2019 un amendement précisant que « le manquement à cette obligation de déclaration relative aux disponibilités d’accueil de l’assistant maternel ne peut constituer un motif de suspension de l’agrément ou le seul motif de son retrait. »
(2) Depuis le 1er novembre 2019, la démission d’une assistante maternelle qui fait suite au refus de l’employeur de faire vacciner son enfant en application des dispositions de l’article L. 3111-2 du code de la santé publique est considérée comme un motif de démission légitime ouvrant droit à indemnisation ; décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage.