Jeunes majeurs : haro contre la proposition de loi
Après plusieurs mois d’intense mobilisation, l’espoir était fort : enfin, grâce à la proposition de loi portée par la députée Brigitte Bourguignon, les jeunes issus de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) pourraient bénéficier d’un accompagnement obligatoire par les départements à leur majorité.
C’était oublier que le gouvernement était resté hostile, depuis l’adoption du texte par la commission des affaires sociales en juillet 2018, à toute forme d’obligation pour les départements sur le sujet. Une position restée discrète ces derniers mois, pour cause de feu médiatique sur la protection de l’enfance, et habilement masquée par la communication gouvernementale derrière la création d’un référentiel pour les jeunes majeurs dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté, ou encore la nomination d’un secrétaire d’Etat à l’enfance, Adrien Taquet.
Le 6 mai donc, le gouvernement dépose un amendement « surprise », qui modifie substantiellement l’article premier du texte en supprimant le caractère obligatoire de l’accompagnement. L’amendement propose d’instaurer un nouveau «contrat d’accès à l’autonomie» accessible sur demande du jeune et sous réserve d’une prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) « pendant au moins dix-huit mois cumulés dans les vingt-quatre mois précédant l’atteinte de leur majorité ».
Pour les jeunes majeurs, c’est la douche froide. « Nous nous sentons trahis. Vous nous avez trahis. Ce soir, les enfants placés de notre pays sont abandonnés une seconde fois » a réagi Lyes Louffok, représentant des enfants placés, sur Twitter. Le collectif Cause Majeur ! dénonce dans un communiqué une version du texte « aux antipodes » de celle adoptée en commission et qui « exclut de nombreux jeunes, dont ceux connaissant un placement tardif en protection de l’enfance, ceux dont les difficultés seraient minimisées pour ne pas les laisser accéder à ce " contrat ", mais également une grande partie des mineurs non accompagnés (MNA) dont l’âge de début de prise en charge par l’ASE se situe fréquemment entre 16 et 18 ans avec des parcours non linéaires. »
Dans un communiqué diffusé le 15 mai, une vingtaine de syndicats et d’associations dénoncent également un texte qui soumet les jeunes majeurs « à une contractualisation aux contenus variables selon le bon vouloir des acteurs départementaux, de leurs choix politiques et sociaux, voire de leur « compassion » ». De son côté, le gouvernement tente de persuader que ce texte constitue une avancée.
Tous les opposants au texte appellent à une mobilisation jusqu’au passage de la proposition de loi devant le Sénat.