Retrait de l’enfant et grossesse
Une récente décision de la Cour de cassation montre les limites du retrait de l’enfant en cas de grossesse de l’assistante maternelle. Le fait pour l’employeur d’apprendre l’état de grossesse de son assistante maternelle quelques semaines après lui avoir indiqué qu’il retirait son enfant pour un motif autre n’empêche pas qu’il soit considéré comme nul. En outre, en cas de scolarisation programmée, il appartient à l’employeur de justifier qu’il a bien proposé un aménagement du contrat de travail à l’assistante maternelle avant de procéder au retrait.
Légalement, l’article L. 423-24 du Code de l’action sociale et des familles autorise les parents employeurs d’une assistante maternelle à retirer leur enfant de sa garde sans avoir à justifier par un motif précis ce retrait, à la différence du droit commun du licenciement qui exige une cause réelle et sérieuse. Pour autant, le motif du retrait ne doit pas apparaître illicite ou manifestement abusif. Selon l’article L. 1225-4 du Code du travail, renforcé par l’article 16 b de la convention collective des assistantes maternelles du 1er juillet 2004, est ainsi fondamentalement illicite le retrait d’un enfant fondé sur la maternité de l’assistante maternelle. En effet, l’assistante maternelle bénéficie, dès qu’elle est enceinte et jusqu’à dix semaines après la fin du congé de maternité d’une protection contre la rupture du contrat de travail du fait de son employeur. L’employeur ne peut effectuer son retrait que si l’assistante maternelle a commis une faute grave non liée à son état de grossesse ou si les parents sont dans « l’impossibilité, pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement, de maintenir le contrat de travail ».
Cette problématique de la grossesse était au cœur d’une affaire soumise à la Cour de cassation. En l’espèce, des parents ont notifié à leur assistante maternelle, le 19 juillet, le retrait de la garde de leur enfant à une assistante maternelle, laquelle les a informés quinze jours plus tard, à l’aide d’un certificat médical de grossesse, de son état. Le retrait de l’enfant était-il donc possible ?
Les parents soutenaient à l’appui de leur demande :
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qu’ils avaient fait des démarches auprès d’une école maternelle plusieurs mois auparavant et que la scolarisation de leur enfant avait été acceptée ;
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que cette scolarisation entraînait la modification du contrat de l’assistante maternelle enceinte et la mettait dans l’impossibilité de retrouver son précédent emploi assorti d’une rémunération au moins équivalente car il était prévu que l’enfant soit pris en charge uniquement trois jours par semaine jusqu’à l’acquisition de la propreté puis un passage en accueil périscolaire après et avant l’école. ;
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qu’ils ne connaissaient pas l’état de grossesse de leur assistante maternelle au moment de la décision de retrait.
Pour eux, le retrait était bien licite et motivé par l’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse.
Tel n’est pas la position de la Cour de cassation. Pour les magistrats, le retrait de l’enfant est bien nul du fait ;
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d’une part, que l’assistante maternelle avait adressé dans les 15 jours suivant la rupture un certificat attestant de son état de grossesse (même si l’employeur ne le savait pas au moment où il a signifié le retrait) ;
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et d’autre part, que l’employeur n’avait pas prouvé que l’intéressée avait refusé d’accepter les nouvelles conditions de garde de l’enfant qui lui avaient été proposées.
Pour la Haute juridiction, il n’y avait pas, en l’espèce, impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement.
Cour de cassation, chambre sociale, n° 16-17886,31 janvier 2018.