Un printemps sous le signe de la qualité d’accueil
Qu’est-ce que la qualité d’accueil ? Si cette notion est sur les lèvres de tous les professionnels de la petite enfance, ainsi que des décideurs en la matière, faut-il encore la définir, la mesurer et la porter. Le Conseil de l’Enfance du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), missionné sur le sujet par le gouvernement, doit remettre prochainement son rapport avec des axes de pilotage. De son côté, l’UFNAFAAM et l’Union nationale des associations familiales (UNAF), ont commandé une recherche sur la qualité au sein de l’accueil individuel dont la publication est proche.
Pour l’heure, le sociologue Pierre Moisset livre une analyse publiée récemment dans la revue Informations sociales publiée par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), dans laquelle il montre que trois conceptions de la qualité cohabitent.
D’abord, la « qualité économique » : il s’agit de répondre à l’objectif de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, afin de soutenir l’emploi des femmes tout en maintenant un taux de natalité élevé. Cette notion émergeant dans les années 1980 perdure aujourd’hui et induit que « la qualité de l’accueil de la petite enfance se mesure alors à sa capacité à répondre aux contraintes professionnelles des parents ».
Ensuite, la « qualité sociale » : il s’agit d’inscrire l’accueil du jeune enfant dans l’objectif de lutte contre la pauvreté, à partir des années 1990. Cela a concerné essentiellement l’accueil collectif, tenu de réserver des places pour les enfants de familles vulnérables afin de favoriser une égalité d’accueil. Un passage « délicat » car les deux qualités, économiques et sociales, se retrouvent en partie « en concurrence » : préemption de places pour certaines familles, difficultés de gestion des places en raison d’un temps partiel plus fréquent pour les parents en insertion.
Enfin, la « qualité éducative », qui est « désormais systématiquement liée au développement linguistique et cognitif des enfants par des échanges verbaux plus systématiques et soutenus de leur accueil ». Cela renvoie aux pratiques des professionnels et requiert des compétences qui « ne sont pas forcément présentes ni dans leur socialisation ni dans leur formation initiale ».
Cette « valse des qualités » engendre selon Pierre Moisset trois « niveaux de difficultés » :
- Une articulation délicate
- Une coordination entre les modes d’accueil sur cet enjeu de qualité qui reste imparfaite en raison de l’hétérogénéité de formation et de compétences chez les professionnels, et de problèmes de faisabilité. « Comment attirer de nouveaux candidats au métier d’assistant maternel pour développer cette offre si, en même temps, on élève le coût du " ticket d’entrée " dans la profession – avec un exigence de formation accrue ? » s’interroge le sociologue.
- Une conception de la politique petite enfance qui, « soumise à des exigences sociales et politiques plus fortes » qui incombaient auparavant à l’école, doit être revue et renforcée sur le plan éducatif.
Pierre Moisset souhaite donc l’avènement d’ « une politique intégrée de l’enfance et de la famille où objectifs, moyens, critères de qualité et compétences professionnelles seraient réinterrogées à l’aune d’une ambition plus explicite pour les enfants et leur développement, engageant pleinement toutes les parties prenantes ».