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Covid : un collectif de professionnels demande le retrait des produits virucides, jugés dangereux

Publié le 03/06/2020
Catherine Piraud-Rouet
Journaliste spécialisée en puériculture et éducation
Des professionnels de l’accueil du jeune enfant alertent sur les recommandations gouvernementales en matière de nettoyage et de désinfection, notamment au domicile des assistantes maternelles. Ils demandent le retrait des produits virucides et le choix de solutions plus respectueuses de la santé et de l’environnement.

Le guide ministériel pour le plan d’action de déconfinement des modes d’accueil du jeune enfant, paru le 6 mai dernier, requiert, pour les lieux d’accueil du jeune enfant, le nettoyage et la désinfection avec un virucide répondant à la norme EN 14476, au moins une fois par jour. Dans une tribune publiée le 19 mai sur le site de l’ASEF (Association Santé Environnement France), un collectif composé de représentants associatifs du secteur (Label Vie, Réseau Environnement et Santé, Association des Collectifs Enfants Parents Professionnels, Union Fédérative Nationale des Associations de Familles d’Accueil et Assistantes Maternelles et Fédération nationale des Educateurs de Jeunes Enfants) tire la sonnette d’alarme sur les dangers de ces produits.

 

Des produits massivement toxiques

« La très grande majorité des formulations du marché répondant à cette norme contiennent des ingrédients toxiques : nocifs pour la peau ou les voies respiratoires (eau de Javel) ; potentiellement cancérigènes, mutagènes ; agissant comme des perturbateurs endocriniens ; favorisant l’obésité chez le jeune enfant», soulignent-ils.

Ils relèvent que les fiches de sécurité de ces produits recommande leur utilisation avec un équipement spécial (gants, lunettes de sécurité, combinaison de protection…) et hors de la présence des enfants. « Ce qui est incompatible avec l’accueil du jeune enfant », commentent-ils. En effet, « leur utilisation dans la pièce voisine ou une heure avant la présence des enfants ne réduit que peu le risque de pollution pour les enfants. Nous avons d’ailleurs de nombreux témoignages d’enfants qui toussent lors du nettoyage de la pièce voisine », ajoutent-ils.

 

Des effets contre-productifs

Autre argument du collectif : les produits de désinfection, dits « biocides », favorisent l’apparition de bactéries antibiorésistantes. Ils citent le « Protocole National de déconfinement pour les entreprises pour assurer la santé et la sécurité des salariés », selon lequel : « Les opérations de désinfection ne doivent être réalisées que lorsque strictement nécessaires (l’usage répétitif du désinfectant peut créer des micro-organismes résistants au désinfectant ; un désinfectant mal employé tue les micro-organismes les plus sensibles mais permet la survie des micro-organismes les plus résistants, le désinfectant n’ayant plus aucun effet et procurant alors un faux sentiment de sécurité ; en outre une désinfection inutile constitue une opération de travail à risque pour les travailleurs (exposition aux produits chimiques, TMS...). » Avant de rappeler que l’efficacité virucide des produits du marché requière un temps de pause minimum d’une minute qui est rarement respecté. « Leur efficacité sera atténuée mais pas leur toxicité… », notent-ils.

 

Cri d’alarme

D’où le cri d’alarme lancé par ces professionnels : «La situation est grave et urgente : à la lecture des recommandations ministérielles et par souci de bien faire, des milliers de professionnels vont mettre en péril leur santé et celle des enfants (…). Il est donc urgent que le Ministère rétablisse la situation en modifiant la recommandation d’usage de virucides répondant à la norme EN 14476. »

 

Pour des alternatives virucides saines

Pour lutter contre le virus sans créer de nouveaux problèmes de santé ni agresser l’environnement, ils préconisent plusieurs solutions alternatives saines et durables, ayant fait leurs preuves d’efficacité et déjà recommandées par des institutions nationales :

Le traitement par les détergents, recommandé aux entreprises par le Ministère du Travail. « Outre son activité de dégraissage des surfaces, le tensioactif va également dégrader les lipides de l’enveloppe du virus SRAS-CoV-2 et ainsi l’inactiver », spécifie le Ministère dans le Protocole cité plus haut.

L’INRS recommande également aux entreprises de continuer à utiliser leurs produits de nettoyages habituels « puisque le SARS-CoV-2 est entouré d’une enveloppe de lipides facilement dégradés par les tensioactifs contenus dans les savons, les dégraissants, les détergents et les détachants ».

Une préconisation confirmée par une étude du Centre for Health Protection de Hong Kong, selon laquelle les virus de type Covid 19 sont très sensibles aux détergents, pourtant non étiquetés « virucide » selon la norme.

Enfin, le traitement par vapeur est préconisé en alternative aux virucides par la Société française d’Hygiène Hospitalière pour lutter contre les virus, y compris le COVID-19. Une efficacité confirmée par une étude de la Fondation pour le Développement de la Recherche Pharmaceutique.

« Nous insistons également sur le fait que ces pratiques, tout à fait efficaces contre le COVID-19 et plus respectueuses de la santé globale des enfants, des professionnels et de l’environnement, seront sans doute plus soutenables pour les professionnels, donc mieux respectées », concluent les signataires du texte.