Deux auteurs dénoncent une « discrimination institutionnalisée » envers les assistantes maternelles
Elle est assistante maternelle, lui est chercheur au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). Ensemble ils ont mené une recherche-action ethnographique pendant douze ans auprès d’assistantes maternelles en région parisienne. La crise sanitaire n’a fait que confirmer la conclusion à laquelle ils commençaient à aboutir : « le statut des assistantes maternelles n’est ni conforme à la devise républicaine, ni à l’Etat de droit, car il viole le droit constitutionnel à l’égalité » décrit Sonny Perseil.
Démonstration
Pour le prouver, ils font une simple démonstration de la réalité : une procédure d’agrément extrêmement contraignante sans qu’aucune assistante maternelle-pair ne participe à l’évaluation, des discriminations à l’embauche en raison de pratique religieuse ou de couleur de peau tolérées car jamais contrôlées par les autorités, un salaire pouvant être trois fois inférieur au SMIC, l’absence de médecine du travail, une forme de néo-domesticité exercée quasi exclusivement par des femmes car elles seraient « plus enclines du fait d’être femme et mère à s’occuper d’enfants ».
Professionnelles esquintées
« Sur le plan salarial et la médecine du travail, les pouvoirs publics considèrent que cette profession n’existe pas en tant que telle car elle ne relève pas du Code du travail, décrit Sonny Perseil. Il est absolument aberrant que les assistantes maternelles dépendent toujours du Code de l’action sociale et des familles (CASF), qui fixe le niveau de rémunération. Quant à la médecine du travail, comment comprendre que ces professionnelles esquintées, victimes de problèmes articulaires, de dos et d’audition ne puissent toujours pas y avoir accès ? Aujourd’hui elles n’ont d’autre choix que d’aller voir en curatif leur médecin traitant qui parfois leur dit : « Mais arrêtez, vous ne pouvez plus continuer ». Ndlr : si l’accès à la médecine du travail, promesse du gouvernement, devrait voir le jour avec la loi ASAP, aucun détail sur l’accessibilité réelle et l’accompagnement en santé n’est connu pour l’instant .
Propositions
Sur chaque point abordé dans le livre, les auteurs émettent des propositions : inclure dans la rémunération la totalité du temps de travail y compris quand les enfants ne sont pas accueillis, créer une compensation pour la garde de son propre enfant de moins de trois ans qui les privent d’une place dans l’agrément, donner la possibilité aux assistantes maternelles de devenir des expertes reconnues.
De l’espoir
« Depuis le début de la crise sanitaire, les assistantes maternelles sont dans l’agenda politique, notamment avec la proposition de loi Ruffin/Bonnell. Nous sommes relativement optimistes et prudents et nous espérons qu’il y aura une prise de conscience » souligne Sonny Perseil. Le livre a été envoyé au gouvernement, ainsi qu’à la Défenseure des droits et au président du Conseil constitutionnel.
L’interview intégrale de Sonny Perseil sera à découvrir dans le prochain numéro de L’assmat