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Egalité des chances : revaloriser l’accueil du jeune enfant

Egalité des chances : revaloriser l’accueil du jeune enfant
Publié le 15/10/2021
Laetitia Delhon
Journaliste spécialisée dans le travail social et médico-social, la petite enfance et le handicap
Un rapport sénatorial préconise de renforcer la qualité d’accueil, la formation des professionnels et de créer un service public d’accueil pour tous les jeunes enfants.

Combien d’études et autres documents faudra-t-il pour que la politique familiale change de braquet ? Ce récent rapport de la sénatrice Monique Lubin sur l’égalité des chances rappelle ainsi des faits scientifiques désormais largement connus : « il est nécessaire d’agir sur les inégalités de développement entre enfants dès la période de la petite enfance car plus les interventions sont précoces, plus élevées sont les chances de réduire ces inégalités et d’éviter que leurs effets négatifs se cumulent et qu’elles s’accentuent à l’âge scolaire ».

Si la cause est entendue scientifiquement, elle a toutefois bien du mal à se mettre en place en France.

D’abord, très peu d’études y sont menées sur l’effet des modes d’accueil formels sur le développement des enfants, notamment des études prenant en compte aussi bien l’accueil individuel que collectif.

Ensuite, de nombreux freins persistent pour l’accès aux modes d’accueil de toutes les familles : insuffisance de la création de places, territoires sous-dotés, manque de valorisation des professionnels qui aboutit à une pénurie.

Critique de la réforme des modes d’accueil

Le rapport préconise donc de renforcer la qualité d’accueil pour laquelle « la France dispose d’une importante marge de progression ». L’autrice pointe notamment le taux d’encadrement en crèche collective, qui est faible par rapport à de nombreux pays européens et pour lequel la récente réforme des modes d’accueil « n’apporte pas une réponse satisfaisante ».

Elle recommande également de développer la recherche-action-formation, à l’instar des recommandations du rapport Cyrulnik sur les 1000 premiers jours, pour mieux mettre en pratique les apports des sciences éducatives et comportementales et les évaluer au sein des modes d’accueil.
 

Renforcer la valorisation

Le rapport préconise de renforcer la formation initiale et continue de tous les professionnels de l’accueil du jeune enfant, et de renforcer leur rémunération : « la France se classe 27ème parmi les 35 pays de l’OCDE pour la qualification des personnels dans les lieux d’accueil de jeunes enfants » relève-t-il.

« L’idée que la prise en charge de jeunes enfants constitue un métier qualifié et non une compétence innée - et surtout féminine - doit donc encore se développer en France » souligne l’autrice. Ce manque de considération « est un des facteurs explicatifs de la pénurie de professionnels de la petite enfance et peut également contribuer à expliquer un taux de rotation important et la fréquence des syndromes d’épuisement professionnel, symptômes d’un malaise au travail qui ne peut qu’avoir des conséquences pour les enfants ».

L’annonce de la création d’un comité filière constitue donc « une première étape ». A noter toutefois que ce comité prévoit un temps de travail particulièrement long, au moins trois ans, alors que la nécessité de promouvoir la filière est apparue depuis de nombreuses années. Enfin l’offre de formation continue des professionnels doit être pérenne et non tributaire de plans ponctuels, comme celle des 600 000 professionnels prévue dans le cadre de la politique de prévention et de lutte contre la pauvreté.
 

Droit au mode d’accueil

Le rapport préconise également de mieux réguler l’offre d’accueil au niveau départemental et de créer un continuum de l’accompagnement pour éviter la césure à l’âge de trois ans.

Enfin, il estime nécessaire « d’engager la réflexion » sur la création d’un service public de la petite enfance et la création d’un droit garanti pour chaque famille à une solution d’accueil.

« Il conviendrait d’en définir le format, qui ne serait pas nécessairement celui d’un accueil à temps plein entre 0 et 3 ans pour tous, mais pourrait constituer un socle garantissant un accès significatif, en termes de durée de présence et de régularité, à un mode d’accueil formel répondant à des critères de qualité – crèche, maison ou relais d’assistants maternels – pour tous les enfants de moins de 3 ans ».

Ce service public d’accueil du jeune enfant « ne ferait pas obstacle au maintien, en parallèle, d’une offre privée, financée par les familles ou par les employeurs » relève l’autrice.