Protection de l’enfance et handicap : changer de braquet
Le rapport de la fédération des associations de protection de l’enfance commence par un rappel : les assistants familiaux et les établissements de protection de l’enfance accueillent depuis dix ans de plus en plus d’enfants porteurs de handicap. Ils peuvent être en attente d’un accueil en établissement spécialisé, accompagnés partiellement en Institut médico- éducatif (IME) ou en Institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP), par un service d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD), accueillis à plein temps après une exclusion d’IME ou d’ITEP, ou, pour les plus jeunes, en attente d’un accompagnement en Centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP) ou en Centre médico-psycho-pédagogique (CMPP).
S’il n’existe pas de statistiques concernant ces enfants accompagnés par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) et en situation de handicap, la CNAPE estime qu’ils atteignent environ 15 à 25 % de la totalité des enfants dans les établissements de protection de l’enfance. L’augmentation du nombre d’enfants concernés est due selon la CNAPE à :
- l’aggravation des pathologies psychologiques et psychiatriques des enfants
- la pathologisation (c’est-à-dire la tendance à considérer comme une maladie) des troubles du comportement
- un meilleur repérage par les professionnels
- la dégradation de la situation des familles
- la diminution des places d’internat en établissement spécialisés
- l’isolement des parents d’enfants atteints de handicap.
Par ailleurs les enfants qui relèvent du secteur médico-social sont parfois exclus de leur établissement pour être orientés en Maison d’enfants à caractère social (Mecs). Une direction qu’ils prennent aussi par manque de places en ITEP ou en IME. Ces difficultés engendrent des tensions et des cloisonnements entre les professionnels de l’un ou l’autre secteur, qui nuisent fortement à l’accompagnement des enfants. Ils sont également sujets à une multiplication des projets autour d’eux qui sont parfois contradictoires et ne permettent pas une vision globale de leur situation.
Le document s’attarde ensuite sur les jeunes majeurs concernés par cette double problématique. Majoritairement, « aucune durée supplémentaire » de prise en charge ne leur est accordée par rapport aux autres, alors que leurs besoins sont plus importants. D’où le « bricolage » de certains assistants familiaux qui « continuent de les héberger bénévolement le temps de trouver une solution de logement », ou parfois de demander un agrément pour l’accueil des adultes afin de poursuivre l’accompagnement. Lors du passage à l’adulte, leur situation fait le plus souvent face à « une absence d’anticipation » des institutions, notamment s’agissant de leur hébergement.
Pour améliorer l’accompagnement de ces enfants et ces jeunes, la CNAPE souhaite agir d’urgence en encourageant :
- le développement d’une politique de prévention en étant attentif au bien-être de l’enfant
- le renforcement des actions d’accompagnement pendant la période périnatale et le jeune âge
- le renforcement de la Protection maternelle et infantile (PMI) et du suivi médical des enfants
- une meilleure articulation des politiques publiques dans les territoires
- une meilleure coopération entre les professionnels, avec des temps de rencontre dans les territoires, des temps d’immersion dans l’autre institution, des formations communes, des ateliers collaboratifs, et des rencontres régulières pour des situations individuelles
- le renforcement des évaluations médicales et des rapports de situation, la mise en place de services à domicile sur des temps longs et d’équipes mobiles pour les situations de crise
- l’anticipation du passage à l’âge adulte en s’appuyant sur les accueils de jour, l’accueil familial pour jeunes adultes, des actions de parrainage
- l’amélioration des connaissances sur cette double problématique.