Accès à la médecine du travail : crise ouverte entre les syndicats et la Fepem
Après le nouveau gel de la formation professionnelle, les révélations sur la Fepem et la galaxie d’opérateurs qui gravitent dans son sillage, dans le viseur de la Cour des comptes, un nouvel épisode secoue la branche des salariés du particulier employeur et des employés à domicile : le choix de l’opérateur qui gérera les frais des salariés liés à leur visite médicale.
Indemnités de défraiement
Explications : à partir du 1er janvier 2025, chaque particulier employeur sera redevable du paiement d’une contribution spécifique « Santé au travail », fixée à 2,7 % des salaires bruts dans la limite de 5 € par bulletin. Cette cotisation est destinée à couvrir l’ensemble des frais liés au suivi individuel de l’état de santé des salariés et à la prévention des risques professionnels.
Ces frais comprennent :
→ l’adhésion auprès d’un Service de prévention et de santé au travail de secteur (SPSTN),
→ le défraiement des salariés afin de compenser leur perte de rémunération et prendre en charge les frais engendrés par leur participation aux visites médicales,
→ l’ensemble des actions de prévention collective des risques professionnels.
La mise en œuvre de l’accès à la médecine du travail est confiée à l’Apni, association paritaire de la branche, gérée par les syndicats représentatifs et la Fepem.
Manne financière
Mais s’agissant de la gestion du défraiement des salariés, les organisations syndicales affirment à L’assmat que la Fepem souhaite la confier à l’organisme Iperia, déjà opérateur de la branche pour la formation professionnelle, corroborant ainsi les informations révélées par Mediapart en juillet.
La manne financière est importante : selon un avenant à l’accord de mise en oeuvre du dispositif prévention et santé au travail du 4 mai 2022, signé le 25 novembre 2024 - mais non encore étendu par le ministère du travail -, le défraiement est de 12,75 € pour une visite médicale d’une heure à distance, de 25,50 € pour une visite en présentiel de deux heures, de 19,12 € pour des examens complémentaires, auxquels s'ajoutent un montant de 11€ pour les frais de transports. « Pour chaque défraiement de 12,75 €, l’opérateur touchera 14 € » décrit Véronique Delaitre, présidente de l’Apni et représentante FGTA-FO.
Association domiciliée chez Iperia
« C’est scandaleux, nous avions demandé depuis plusieurs mois un appel d’offres, nous n’avons jamais été entendus, poursuit Véronique Delaitre. Il est hors de question qu’Iperia gère ces frais ».
Les organisations syndicales déclarent avoir appris très récemment par la Fepem la création d’une association dans ce but en mai dernier, intitulée « mandats & domicile » et domiciliée au siège social d’Iperia à Alençon [ndlr : sollicité, Iperia n’a pas répondu à nos questions].
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« Une prise d’otage »
« C’est presque une prise d’otage : ils créent une association non paritaire sans nous en parler, c’est une politique de la terre brûlée » s’insurge Stéphane Fustec, vice-président du Conseil national paritaire du dialogue social et représentant CGT.
De son côté, la Fepem dément avoir été à l’origine de la création de l’association « mandats & domicile », affirme en avoir pris connaissance seulement récemment et ne pas savoir qui compose son bureau. Elle dément aussi avoir refusé de lancer un appel d’offres et affirme au contraire avoir proposé d’en lancer un entre les opérateurs du secteur – Iperia, Ircem, Apni - « ce que les organisations syndicales ont refusé », assure-t-elle.
« Parallèlement, il a été constaté que l’Apni n’avait engagé aucune démarche pour assurer le défraiement, ce dont elle a pourtant la charge » poursuit la Fepem.
Réunion houleuse en vue
Une réunion, qui s’annonce houleuse, aura lieu demain matin pour décider paritairement qui sera l’opérateur de défraiement. « Nous allons refuser le chantage de la Fepem, poursuit Stéphane Fustec. Nous lui proposons de rendre l’association qu’elle a créée paritaire et de la laisser opérer sous notre contrôle, avant de passer le relai à l’Apni. Mais l’opérateur ne sera pas Iperia, quoiqu’il arrive. On nous a pris pour des imbéciles, mais ça ne dure qu’un temps ».
De son côté la Fepem propose, à « défaut d’autre solution, et dans un souci d’assurer la prévention et la santé au travail des salariés du secteurs de confier à titre provisoire pour un an, avec une clause de revoyure, le défraiement à une association paritaire ».
Un accès repoussé ?
Sans entente demain, quelles pourraient-être les conséquences pour les assistantes maternelles ? « Le SPSTN démarrera bien la prévention et la santé au travail le 2 janvier 2025 » assure la Fepem.
Stéphane Fustec assure lui que le démarrage opérationnel pourrait être repoussé de plusieurs mois « Il n’est pas exclu que cet épisode provoque d’autres incidents en cascade, que la Direction générale du travail demande des comptes et que cela fasse exploser le système. Cela fait 13 ans que je travaille sur l’accès à la médecine du travail, mais j’aime autant que les salariés attendent encore quelque mois, même si c’est malheureux ».
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